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Ignifugation une évolution réglementaire attendue

Le traitement de l’inflammabilité du bois est un enjeu pour l’accroissement de sa part dans la construction immobilière. « Si le bois devenait difficilement inflammable, cela accélèrerait sa part dans la construction, résume Emmanuel Troccon. Le retardateur de feu est un enjeu de l’ignifugation des bois. Actuellement, le retardateur est appliqué ‘à la petite semaine’. Il n’existe pas réellement de machine économiquement accessible pour l’appliquer de façon industrielle et automatisée. Il ne se fait que sous forme d’autoclave, avec une productivité moindre en termes de volumes. La technologie que nous projetons pourrait démocratiser l’accès à cette qualité de traitement par ignifugation. Un partenariat est en cours de développement avec un industriel. » D’un point de vue réglementaire, les arrêtés de la réglementation incendie « sont en discussion. Cela ne sera pas une refonte, mais une adaptation. La réglementation était plutôt conçue pour les matériaux incombustibles. On ne sait pas quand les arrêtés en question sortiront, constate Jean-Baptiste Aurel, fondateur de Woodenha (amélioration du comportement au feu dans les systèmes constructifs), dont le catalogue est une référence en terme de performance à la réaction au feu. Tous les acteurs de la protection incendie ont été interrogés. Nous avons répondu à une enquête il y a quelques semaines. Différents courants existent. Nous sommes confrontés à la doctrine de la préfecture de police de Paris et de la brigade des sapeurs-pompiers. Cette doctrine impacte les orientations sur l’évolution potentielle de cette réglementation. Par exemple, sur l’interdiction de surface apparente combustible. Mais ces positions ne prennent pas en compte les solutions alternatives pour ces bois apparents, avec une bonne maîtrise de la réaction et une résistance au feu. Par ailleurs, un arsenal normatif est déjà à notre disposition pour justifier de cette performance. Chose que l’on n’a pas sur de nouveaux matériaux qui ne sont pas encore considérés comme des produits de construction au sens du Règlement des produits de construction. »

Ces divers sujets ont alimenté les discussions lors de réunions interministérielles, voici quelques mois. « Où positionner le curseur  ? Plutôt sur des solutions référencées et connues  ? Ou bien en s’accordant des solutions plus innovantes, avec des avis de laboratoires, en privilégiant le risque raisonnable  ? », restitue l’expert. Après la modification de la réglementation sur les immeubles d’habitation de 3e et 4e  famille, et la possibilité d’insérer des matériaux combustibles sur les immeubles de 3e  famille A et B en prouvant que la propagation du feu sur la façade est maîtrisée, qu’attendre de l’évolution à venir  ? Pour Jean-Baptiste Aurel, la combinaison des objectifs de la RE2020 et de la réglementation incendie est possible. « La décarbonation de la construction passera par des matériaux vertueux comme le bois, consommant moins d’énergie et d’eau à leur fabrication. Les moyens de protection existent. Il ne faut pas s’alarmer de la performance que l’on peut donner à des bâtiments avec des ressources biosourcées. Soyons positifs. Gardons à l’esprit les développements déjà conduits. Nous allons poursuivre, pour développer des niveaux de sécurité qui continueront à permettre d’utiliser des matériaux combustibles dans des immeubles de bureaux ou d’habitation, ainsi que des ERP. La gestion de la durabilité du feu, à l’intérieur et l’extérieur, est cruciale pour les matériaux biosourcés. » Parmi les points à suivre, selon lui : la nécessité de « bien apprécier la durabilité de la performance dans le temps, en fonction des conditions d’utilisation. C’est un enjeu de la durée de service et de performance, que ce soit en réaction et résistance au feu ». Woodenha bénéficie de son expérience dans le monde des transports ferroviaire et maritime pour gérer la toxicité des fumées. « Nous savons combiner la performance en réaction au feu et la performance acoustique, qui sont des systèmes discontinus. Ces systèmes sont difficiles à gérer en terme de performance au feu. Nos systèmes privilégient la performance au feu, puis la performance acoustique, et pas le contraire. La finesse de l’appréciation de la performance au feu nous permet de faire évoluer nos systèmes constructifs en combinant ces deux plans. »