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La filière forêt-bois esquisse son scénario carbone

La forêt française et la filière forêt-bois : un rôle majeur dans la lutte contre le changement climatique

Le 13 février dernier, les divers représentants de la filière forêt-bois-papier (France Bois Forêt, le Codifab et la Copacel) étaient réunis à Paris pour dévoiler à la presse les résultats d’une étude inédite visant à esquisser un « scénario carbone » pour le secteur à l’horizon 2030-2050.

Alors que le réchauffement climatique et la séquestration carbone sont sur toutes les lèvres, et à l’heure de la préparation de la Stratégie française énergie climat (SFEC) dans le cadre de la planification écologique, les représentants de l’interprofession France Bois Forêt (FBF), du Comité professionnel de développement des industries françaises de l’ameublement et du bois (Codifab) et de l’Union française des industries des cartons, papiers et celluloses (Copacel) ont fait appel au cabinet Carbone 4 pour réaliser une étude inédite visant à modéliser l’ensemble des flux physiques de matière (dont les imports et exports, le recyclage et le réemploi) en vue de construire un scénario carbone commun pour le futur. Cette étude d’une ampleur sans précédent a impliqué l’ensemble des maillons de la filière afin de mettre en lumière « le rôle central de la filière forêt-bois face au changement climatique, en termes d’adaptation et d’atténuation ».

Après des mois de collecte de données et de modélisation, elle a permis de dégager plusieurs constats autour de deux axes.

1. La forêt française et les produits en bois qui en sont issus jouent un rôle majeur dans la lutte contre le changement climatique

Premier constat de l’étude, la filière participe doublement à la séquestration et au stockage du carbone : dans les forêts d’une part, et dans les produits bois d’autre part. Ces deux leviers doivent donc être mobilisés simultanément « pour maximiser la contribution de la filière à l’atteinte de la neutralité carbone au niveau national », insiste l’étude.

Deuxième constat : les forêts souffrant de plus en plus des effets du changement climatique (ralentissement de la croissance, dépérissement, attaques parasitaires, mortalité, incendies…), le scénario de l’étude s’est basé sur l’hypothèse d’une amplification graduelle des phénomènes climatiques à horizon 2050.

Ainsi, l’adaptation des forêts françaises à l’évolution du climat devra impérativement être conduite de manière active afin de réduire le risque de déstockage massif de carbone et pour conserver la capacité des écosystèmes à préserver la biodiversité.

En ce sens, plusieurs actions devront être menées de front de façon à assurer une surveillance renforcée de la santé des forêts, à réaliser des prélèvements anticipés et réactifs des bois dépérissant, et à procéder à un renouvellement forestier en faveur de l’adaptation de la forêt au climat futur.

2. La filière forêt-bois doit s’engager vers un scénario volontariste

Troisième constat de l’étude : pour pouvoir atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, des changements de comportements de la société seront nécessaires. Le scénario de « sobriété » développé dans cette enquête implique également des évolutions à tous les stades de la filière pour répondre à la demande de la société.

Quatrième constat, plutôt positif pour les professionnels de la filière : la décarbonation de l’économie française passera inévitablement par un plus grand recours au matériau bois dans les différents usages.

Ainsi, l’augmentation progressive et mesurée de la récolte annuelle [de l’ordre de + 10 Mm3 d’ici 2035, NDLR] demandera de mobiliser l’ensemble des forêts à travers une dynamisation proportionnée, en lien avec l’objectif de leur adaptation au changement climatique. Sachant que ce nécessaire accroissement de la récolte sera également assorti d’une hausse des capacités de transformation et de l’attractivité socio-économique des activités de gestion et d’exploitation forestières

Cinquième constat : la fluctuation probable de la récolte forestière, en lien avec les futures crises climatiques, devra s’accompagner d’une adaptation et d’une réorganisation de la gestion forestière pour valoriser au mieux les bois. Ainsi, l’aptitude à répondre à la demande des différents marchés nécessitera d’articuler encore plus la ressource de bois autour des usages matière bois d’œuvre et bois d’industrie, notamment ceux à longue durée de vie (construction et ameublement). Le tout en développant le réemploi et le recyclage des produits en fin de vie grâce à des investissements déterminants dans l’innovation et les infrastructures industrielles.

Sixième constat : une bonne articulation des flux de la filière sera essentielle pour satisfaire les différents marchés et l’équilibre au sein de cette même filière. Une priorisation stricte parmi les usages du bois énergie sera indispensable pour renforcer la compétitivité des industries de transformation du bois, primordiaux au vu de leur contribution au stockage carbone dans les produits bois. « L’utilisation de bois-énergie devra donc être fléchée en priorité vers l’autoconsommation de la filière et conduit à un doublement du volume consommé à cet usage (+ 7 Mm^3) à horizon 2050 par rapport à 2019 », affirme l’étude.

Septième et dernier constat : la relocalisation des approvisionnements de bois devra être amplifiée dans un objectif de neutralité carbone global et de souveraineté nationale. Autant d’enseignements à diffuser auprès de l’ensemble des professionnels de la filière et à rapidement mettre en pratique pour assurer le meilleur avenir possible à la forêt française et aux produits bois.

Adèle Cazier