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La vague de l’écocertification prend de la hauteur

Les distributeurs de fin de chaîne tirent le marché de l’écocertification. Les marques distributeurs demandent de plus en plus de produits écocertifiés. BOISmag détaille le phénomène en interrogeant deux experts : Guillaume Dahringer, directeur technique de FSC® (Forest Stewardship Council®) France et Paul-Emmanuel Huet, directeur exécutif de PEFC France.

Les critères FSC recherchent l’équilibre entre critères économiques, durabilité écologique de la récolte, protection de la biodiversité et critères sociétaux – droit des travailleurs et prise en compte des parties prenantes du territoire. « D’ailleurs, dans notre système de gouvernance, les acteurs économiques, environnementaux et sociaux ont un poids égal dans la prise de décision. Cela constitue une crédibilité forte auprès des consommateurs finaux des produits, notamment les distributeurs », détaille Guillaume Dahringer. Par exemple, des enseignes de Saint-Gobain, telles que Point.P ou Dispano, passent à la certification FSC pour fournir le marché de la construction, « qui s’intéresse lui-même de plus en plus à la certification. C’est encore un petit nombre qui franchit le pas, mais ce sont pour moi des pionniers qui voient venir l’évolution du marché. L’écocertification des produits va devenir inévitable », analyse-t-il.

Les négoces et les entreprises de transformation de bois rond, depuis 3 ou 4 ans, sont de plus en plus nombreux à s’engager dans la certification FSC. «Entre 2019 et 2022, elles sont passées de 30 à 60 en France. Il y a une vraie dynamique, avec une concentration dans certaines zones, en fonction des bassins d’approvisionnement certifiés FSC : Limousin, Centre, Dordogne… Dans ces régions, de grands acteurs forestiers, des coopératives forestières, l’Office national des Forêts ou encore la société forestière de la Caisse des Dépôts sont certifiés, ou vont l’être sous peu. » L’objectif étant de pouvoir fournir aux scieurs des bois certifiés FSC, dans toutes les essences. Les bois éco-certifiés peuvent être valorisés plus facilement par les scieries. «Les produits connexes vont vers l’industrie papetière et du panneau. Et les scieries s’ouvrent sur d’autres marchés de sciage : palette certifiée (résineux), résineux pour la construction, produits feuillus (châtaignier, chêne) pour le parquet ou tonnellerie…»

Un guide pour les scieurs

FSC France accompagne les scieurs dans la mise en place de la certification et la prospection, pour identifier les marchés en demande. Un guide dédié est mis en ligne. Un salarié informe les entreprises sur différents aspects  : «Approvisionnement auprès des forestiers, valorisation pour commercialiser auprès des distributeurs, et sensibilisation au marché européen, les Pays-Bas et le Royaume-Uni étant notamment très demandeurs de produits écocertifiés. » L’aspect humain est important, selon l’expert. «On ne peut pas rester que sur des supports digitaux froids. Il faut être dans la rencontre, les connexions. D’autant plus que les bouleversements que connaît l’Europe de l’Est, suite à la guerre en Ukraine, ont des répercussions sur les marchés français. »

Prix plus élevés, mais accès au marché

Revers de la médaille écocertifiée  : ces produits sont plus chers. Se pose alors l’enjeu du partage de la valeur de l’écocertification, tout au long de la chaîne. «Le niveau d’exigence pour les forestiers est important, et leur demande des investissements et des efforts, en termes environnementaux, sociaux et de concertation avec les parties prenantes du territoire. Il y a aussi des coûts d’audit et de certification, un ajustement de la gestion forestière… Autant de paramètres nouveaux pour les forestiers. Comment partage-t-on ces investissements ? Cela ne peut pas être qu’auprès des scieurs qui achète le bois, mais aussi auprès des marques de distributeurs. Chacun doit prendre sa part dans cette montée en gamme écoresponsable. Des réflexions sur le sujet sont en cours. »

«Les bois écocertifiés sont un peu plus chers, mais ils facilitent l’accès au marché, par rapport à des concurrents non certifiés. Et cette tendance va s’accélérer », observe Paul-Emmanuel Huet, directeur exécutif de PEFC France.


Industrialisation de Produits et Systèmes Constructifs Bois : Quelques Lauréats de l’Appel à Projets

Occitanie:
Le projet Diapason, porté par la structure Solidlay du groupe Neofor, vise le développement d’une nouvelle unité de fabrication de panneaux de bois massif multicouches. Un autre projet, B&C Futur, a pour objectif la modernisation des équipements de la scierie Bois Ariégeois afin d’augmenter sa production de grumes de 100 m³ par jour à 500 m³ par jour.

Auvergne Rhône-Alpes:
Le projet Opérateur 360°, mené par la structure Gipen-Roux, vise l’extension et la modernisation d’une unité de production avec la création d’une ligne de fabrication d’ossature bois en 2D, 3D et menuiseries bois intégrées. Un autre projet, Silvaé, prévoit la création d’une Scic dédiée à la filière Bois et Habitat, englobant la Scierie Bottarel (scierie de feuillus du Grésivaudan) ainsi qu’un deuxième site dit “Très Gros Bois” destiné aux bois de charpente.

Bourgogne Franche-Comté:
Le projet Charm’ de la Vallée, porté par la structure Charm’Ossature, a pour objectif de créer une nouvelle unité de fabrication en série d’éléments ossatures bois sur mesure, selon un modèle industrialisé 4.0.

À noter:
En 2030, la France lance plusieurs appels à projets pour soutenir la filière bois et forêts, dont l’appel à manifestation d’intérêt “Exploitation forestière et sylviculture performantes et résilientes” (AMI ESPR), l’appel à projets “Biomasse chaleur pour l’industrie du bois” (AAP BCIB), et l’appel à projets “Industrialisation de Produits et Systèmes Constructifs Bois et Autres Biosourcés” (AAP SCB). Ces initiatives permettent aux scieries d’augmenter leurs capacités de production et de produire des énergies renouvelables. Certaines unités fonctionnent avec des chaudières à gaz pour les séchoirs. Face à l’augmentation des coûts énergétiques, développer des solutions biomasse avec une autoconsommation et un bon dimensionnement de l’installation est devenu essentiel, selon Clément L’Hostis (FCBA). De plus, ces appels à projets encouragent les entreprises de 1re transformation à évoluer vers la 2e transformation en utilisant, par exemple, les sciages pour produire du CLT et du lamellé-collé, augmentant ainsi la valeur ajoutée des produits. L’Ademe met en ligne sur son site internet une page présentant les aides financières disponibles dans le cadre du dispositif AAP SCB.


PEFC s’engagera en 2024 dans un nouveau cycle

Le système de certification international (55  pays) PEFC, implanté en France depuis 1999, est en pleine révision de ses standards de gestion forestière durable. Le cycle de révision, entamé il y a 18 mois, arrive au terme de son processus. 117  parties prenantes, réunies en trois chambres, ont été conviées à participer aux discussions : forêt et sylviculture (notamment, propriétaires, ONF, coopératives, gestionnaires), forêt et entreprises (notamment représentants de toutes les fédérations regroupant les entreprises de la filière), forêt et société (associations environnementales, de consommateurs, de chasseurs…). «Pendant cette phase d’échanges, nous avons observé un engouement fort. Nous avons vu la participation active d’acteurs qui n’étaient pas présents auparavant. PEFC est certes une certification, mais il faut souligner la plateforme de dialogue d’acteurs mise en place. La forêt n’a jamais été autant au centre des discussions et des préoccupations qu’aujourd’hui, analyse Paul-Emmanuel Huet. Il n’y a qu’à relever le nombre conséquent d’articles évoquant la forêt, comparé à des périodes récentes, où le sujet était peu traité. Cela s’explique par une prise de conscience collective. La forêt apparaît comme une solution au changement climatique, avec sa capacité d’absorption du dioxyde de carbone. Son rôle de pompe à carbone doit s’accroître.» Mais la forêt est aussi exposée aux effets du dérèglement climatique. «Nous pensions tous la forêt très résiliente. Elle l’est, de manière générale. Mais elle a du mal à encaisser les hausses de température de plus en plus fréquentes en période estivale, et le manque d’eau», ajoute-t-il. Parmi les sujets sensibles abordés dans le cadre de la révision de ses standards de gestion forestière durable, la définition des seuils de coupes rases. Le compromis trouvé « privilégie une approche par palier, avec des seuils de surface, en fonction des différentes situations rencontrées sur le terrain : pentes, typologies de peuplements… Il ne s’agit pas d’être pour ou contre les coupes rases ». Autre exemple de débat passionné : l’introduction de la notion de diagnostic, pour permettre aux propriétaires forestiers d’anticiper, d’appréhender au mieux l’impact des choix de gestion sur la parcelle, en prenant en compte l’état du peuplement, la qualité des sols, la disponibilité en eau, les essences les plus adaptées… «Ce diagnostic doit amener le propriétaire forestier à se poser les bonnes questions, et à apporter des réponses sur la façon dont les critères ont été considérés », ajoute Paul-Emmanuel Huet.

Autre nouveauté, dans les nouveaux standards : l’extension du périmètre de la certification aux espaces agroforestiers. « Jusqu’à présent, nous certifiions les forêts et les bois issus des forêts. Désormais, la certification s’ouvre aux arbres hors forêt. Par exemple, l’alignement de peupliers sur des espaces à usage agricole, ou bien des haies dans les bocages. Ce sont des espaces à enjeux, qui peuvent notamment être valorisés d’un point de vue énergétique. Or, ils sont menacés de dégradation voire de disparition, et il faut les préserver. PEFC peut jouer un rôle dans la gestion durable de ces espaces certifiés.» Par ailleurs, la vigilance s’accroît sur le risque incendie. Le diagnostic sur le risque incendie, au sein des parcelles, « doit être renforcé, pour identifier les zones à risque, intégrer le risque dans la planification, appliquer les mesures territoriales définies telles que le débroussaillement, l’élagage, la mise en place de coupe-feux permanents, s’insérer dans les schémas de desserte lorsqu’il existe…».

L’approbation des nouveaux standards par l’assemblée générale de PEFC France devrait intervenir en juin. Un bureau d’audit indépendant s’assurera ensuite de la conformité de ces nouvelles exigences avec les standards internationaux de référence PEFC (socle commun d’exigences décliné dans chaque pays membre du système). Puis, une fois la conformité évaluée et confirmée, les nouveaux standards français de gestion forestière durable PEFC seront soumis à l’approbation et à la reconnaissance de PEFC International, pour une entrée en vigueur prévue à partir du deuxième semestre 2024.

La France « totalise 8,1  millions d’hectares de forêts certifiées PEFC, dont 5,7  millions dans la métropole, soit un tiers de la surface forestière métropolitaine et 2,4  millions en Guyane). Autant dire que le système de certification est bien implanté dans la filière forêt-bois française », explique Paul-Emmanuel Huet. Le standard de gestion forestière durable PEFC s’applique aux propriétaires forestiers déjà engagés dans PEFC et à ceux souhaitant faire certifier leurs parcelles. Le bois issu des forêts ainsi certifiées peut être labellisé PEFC. Les différentes entreprises qui vont s’approvisionner, transformer et vendre cette matière « doivent faire certifier leur process et la traçabilité du bois jusqu’au consommateur final. Avec 3 300 sites d’entreprises certifiés, PEFC est très bien représenté par le secteur industriel en France ».

Le siège de PEFC France compte six salariés (parmi leurs missions : définition et évolution des standards selon les enjeux, visibilité de la marque en France, accompagnement des entreprises). Il existe également neuf organisations régionales certifiées PEFC, réunissant 25  salariés, chargées de promouvoir la certification forestière PEFC sur le territoire et de faire adhérer, accompagner et contrôler les propriétaires forestiers, les exploitants forestiers et les entrepreneurs de travaux forestiers sur les règles de gestion forestière durable PEFC. Une entité d’accès à la certification de groupe, composées de coopératives forestières certifiées PEFC, existe aussi. Elle porte en nom et place des adhérents qui le souhaitent le respect des exigences liées à la certification PEFC et réalisent, auprès d’eux, le contrôle du respect de ces exigences.

En 2023, la demande de produits certifiés est « soutenue dans les bois d’œuvre, bois industrie et bois énergie. La demande de produits certifiés par les prescripteurs publics et privés s’intensifie. Le taux d’engagement des acteurs de la filière est élevé et croissant, depuis la première transformation jusqu’aux distributeurs. Globalement, la certification PEFC est bien connue, à la fois en termes de standard de gestion forestière et de garanties que peut apporter la certification». Les scieries sont certifiées « à plus de 90%».


Biomasse Chaleur pour l’Industrie du Bois : Comment les Industriels S’Engagent dans la Transition Énergétique

Dans son dernier numéro, BOISmag met l’accent sur les premiers lauréats de l’appel à projets BCIB (liste non exhaustive) et leur engagement dans la transition énergétique :

  • Les Scieries Réunies du Chalonnais (groupe SRC), spécialisées dans la transformation du chêne pour produire du parquet chêne massif 100 % français, envisagent d’augmenter leur offre en mettant en place des capacités de séchage supplémentaires et une cogénération biomasse alimentée par les connexes issus des activités de sciage.
  • Seignol SAS, une entreprise de sciage de résineux pour la production de palettes, prévoit d’installer de nouveaux séchoirs, de convertir les séchoirs au fioul existants à la biomasse et d’investir dans une unité de granulation et/ou la fabrication de blocs de bois compressés. Ce projet repose sur une nouvelle chaufferie biomasse avec cogénération, en substitution de la chaudière au fioul existante.
  • ETS Pierre Robert et Cie, spécialisée dans la transformation de grumes de chêne pour des plots, avives, frises, charpentes et autres pièces équarries, va assurer l’autonomie énergétique de son site en adoptant un système biomasse. Cela permettra d’adapter les moyens de séchages existants et de doubler les capacités.
  • Union Forestière Viganaise (UFV), scierie active dans le sciage et le rabotage de résineux pour la fabrication de bois de structure et d’ossature, prévoit d’investir dans une chaufferie biomasse avec cogénération. Cette initiative augmentera la capacité de séchage du site et diversifiera ses activités industrielles.
  • La société Farges, spécialisée dans le sciage et la valorisation des bois résineux, a lancé le projet Farges Bois. Celui-ci implique la création d’une chaufferie biomasse en cogénération à Égletons, assurant ainsi 100 % des besoins énergétiques du site.
  • PGS SPB, filiale du groupe PGS spécialisée dans la fabrication de palettes en bois, prévoit de remplacer son installation gaz actuelle par une chaudière biomasse sur son site de Saint-Florent-sur-Auzonnet, le transformant ainsi en le deuxième site de production du groupe en France.

Ces initiatives démontrent l’engagement des industriels dans l’adoption de sources d’énergie renouvelables, contribuant ainsi activement à la transition énergétique du secteur industriel du bois.