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J’imagine pour LCB, comme pour l’ensemble de la filière, un avenir radieux

 

Jean-Louis Camici, président de l’association Le Commerce du Bois

J’imagine pour LCB, comme pour l’ensemble de la filière, un avenir radieux

 

Quand l’association Le Commerce du Bois a-t-elle été créée et quels sont ses principaux axes de développement ?
Le Commerce du Bois (LCB) a vu le jour il y a 21 ans à la suite du regroupement d’associations plus anciennes créées, pour certaines, il y a plus d’un siècle. Aujourd’hui, LCB compte 125 membres et se concentre sur l’importation, la transformation en France et la distribution de bois et dérivés du bois. Actuellement, nous travaillons sur quatre axes stratégiques : garantir l’origine de tous les bois produits importés par l’ensemble de nos membres; promouvoir le bon bois pour le bon usage ; publier des statistiques d’importation les plus fiables et précises possible ; et échanger entre nos adhérents via nos différentes commissions (Résineux, Panneaux, Terrasse, Négoce, Bois tropicaux, RSE & RBUE).

L’un des objectifs de LCB est de lutter contre la production de bois illégale et de promouvoir les matériaux renouvelables.

Le bois légal a toujours été un axe fort pour LCB avec, notamment, la mise en place d’un système de diligence raisonnée (SDR) propre à LCB en 2015 à la suite de l’entrée en vigueur du RBUE deux ans plus tôt. Quels seront les prochains défis à relever pour lutter contre le bois illégal ?

Notre défi est d’avoir des garanties de plus en plus solides pour que tous les bois que nous consommons soient issus de sources non controversées. Pour relever ce défi, nous mettons à disposition de nos membres une analyse des risques d’illégalité. Cette analyse s’appuie notamment sur une collecte de documents de légalité et, selon les cas, sur des mesures d’atténuation des risques. Dès qu’il y a un document manquant ou un risque avéré, et que ce dernier n’est pas atténuable, l’entreprise n’a pas d’autres choix que de renoncer à l’achat du lot considéré, voire de changer de fournisseur, peu importe le chiffre d’affaires perdu ! De plus, le SDR LCB interdit l’achat de produits bois et dérivés issus de pays pour lesquels le risque n’est pas atténuable, tel que le Myanmar par exemple, et n’autorise dans certains cas que les produits bois et dérivés porteurs d’une certification mondialement reconnue, notamment pour les panneaux de contreplaqué en provenance de Russie ou encore de certains pays d’Asie.

 La filière à besoin de s’équiper et de se structurer.

La flambée des cours de certaines essences, couplée à une pénurie sur certains produits, n’est-elle pas propice à une recrudescence des importations illégales ? Pensez-vous que cette situation va perdurer au cours des prochains mois, voire des prochaines années ?

Grâce à la mise en place de mesures de plus en plus contraignantes dans les pays à risque, le commerce du bois illégal ne fait que diminuer. Dans les échanges internationaux comme dans tout le reste, rien n’est tout blanc ou tout noir; aussi, même si tout n’est pas réglé et qu’il existe encore quelques trous dans la raquette, la situation s’est très nettement améliorée au cours des dernières années. Concernant la situation actuelle, il est plus juste de parler de flambée des prix que de pénurie. Le problème, c’est que dès qu’il manque quelques volumes de bois, certains professionnels ont le sentiment d’être en manque de matière et adoptent parfois des comportements excessifs en gonflant leurs stocks. Ce qui amplifie le phénomène et donne lieu à une situation très tendue ! Le fait est qu’il existe actuellement un déséquilibre entre l’offre et la demande qui fait monter les prix. Mais cette situation ne devrait pas durer au-delà de 2022. L’offre est en train d’augmenter et les industriels s’organisent et investissent pour accroître leur production. De plus, la demande apparente commence à baisser et un point d’équilibre devrait être atteint dans les prochains mois. En revanche, bien malin est celui qui pourra prédire les prix lorsqu’ils seront stabilisés !

Comment voyez-vous l’avenir de votre association dans 5, 10 ou 20 ans… ? Et celui de la filière bois de façon plus générale ?

J’imagine pour LCB comme pour l’ensemble de la filière un avenir radieux. La pandémie de la Covid19 a mis les produits biosourcés en général, et le bois en particulier, au cœur des préoccupations des Français. Par ailleurs, il y a une volonté politique très forte pour promouvoir les matériaux renouvelables dans la construction, avec le soutien actif de notre ministre de l’Agriculture Julien Denormandie qui sait de quoi il parle ! La RE 2020 et les 300 millions du plan de relance de la filière forêt et bois en sont des exemples. Tout ceci représente une vraie opportunité pour la filière, d’où le fait que je sois très optimiste quant à l’avenir du bois en général, et en particulier, dans la construction et la décoration.

Quels seront, selon-vous, les grands marchés bois de demain ?

La construction, bien sûr, sera certainement un marché à forts volumes. Outre la construction, je pense que les secteurs de l’emballage et du panneau décoratif ont de beaux jours devant eux avec des perspectives de croissance importantes. Sans oublier tout ce qui touche à la décoration intérieure et extérieure, où les résineux et les bois durs auront toute leur place. Les bois tropicaux sont et resteront un marché de niche, ce qui est une bonne chose à l’aune de la pression exercée sur la forêt tropicale. À l’avenir, seuls les professionnels ayant pignon sur rue continueront à travailler sur ce marché avec des garanties de légalité. Être un marché de niche n’est pas péjoratif, le marché du vêtement de luxe est un marché de niche et les Français y excellent.

Les récentes annonces du gouvernement en faveur du bois concernant la RE 2020 promettent un bel avenir à notre matériau. Comment imaginez-vous la construction bois de demain ?

Ces annonces promettent au bois de belles marges de progression dans la construction sous forme de bois massif et surtout de produits d’ingénierie (LVL, CLT, lamellé-collé). Selon moi, l’avenir du bois passera moins par la construction de maisons individuelles que par la réalisation de petits collectifs groupés et d’immeubles de grande hauteur (IGH) et cela, grâce aux bois techniques. Certes, pour les immeubles de grande hauteur, on est très en retard par rapport à d’autres pays d’Europe concernant la production de bois techniques mais je suis plutôt confiant car la volonté politique est avec nous et les industriels français accélèrent les investissements productifs. Par ailleurs, ces constructions ne seront pas forcément 100% bois mais joueront sur la mixité des matériaux avec, par exemple, des soubassements et un RDC en béton surmontés d’une structure bois et de renforts en acier. Il ne faut pas opposer les matériaux mais utiliser celui qui est le plus adapté à la fonction recherchée.

La filière sera-t-elle à même de répondre à une demande croissante et de s’organiser pour atteindre les objectifs gouvernementaux ?

Pour atteindre ces objectifs, il y a deux enjeux essentiels à prendre en compte : le besoin de s’équiper et celui de se structurer. Il est important de rappeler que le manque de production française de bois techniques n’est pas un frein à leur utilisation. Pendant que les industriels s’équipent, il n’y a aucun problème à aller s’approvisionner dans d’autres pays. On ne va pas se priver de poutre en I du fait d’une production nationale insuffisante. Il y a quelques années, il n’y avait aucune usine de CLT dans l’Hexagone. Aujourd’hui, plusieurs acteurs se partagent le marché. Donc il faut laisser le temps aux industriels d’investir, sachant que le plan de relance est là pour nous y aider. Le deuxième enjeu est plus complexe. Il s’agit de la taille critique dont les entreprises auront besoin pour répondre aux besoins des majors du bâtiment. Aujourd’hui, contrairement au béton ou à l’acier, la filière est encore composée de beaucoup de petites structures. Face à nous, on voit de plus en plus arriver de gros promoteurs qui s’intéressent au bois. La question à se poser est la suivante : comment parler avec des gens à qui nous devons fournir des solutions complètes? Face à cette problématique, il serait judicieux de réfléchir à la mise en place de consortiums, ou à toute autre solution permettant de mutualiser toutes les compétences et les ressources financières dont a besoin la filière pour répondre à l’ensemble des appels d’offres, y compris sur des projets complexes. Pour l’instant, on a la compétence technique, mais ça ne suffit pas face aux promoteurs qui arrivent en masse. La notion de regroupement est donc à étudier avec attention…

Propos recueillis par Adèle Cazier